Présentation
Ce n'est pas un recueil de poèmes, mais un long poème qui raconte une enfance perdue, meurtrie au milieu d'un verbe qui s'est installé et a figé les choses, un verbe qui a dû se taire sous le commandement d'une parole dominante, un verbe qui resurgit et se révèle, par hasard, de et par la force de la rencontre amoureuse. La poésie met en forme, rend compte d'un réel déformé et déconstruit, elle reconstitue le verbe (re)conjugué, le verbe retrouve son temps, son mode, et peut, enfin, sortir du couloir infinitif, et parler. Le recueil est un chemin à parcourir, une fois puis deux. Il se déploie, à plusieurs endroits, plusieurs entrées. On peut y entendre des voix, un verbe animé qui dit un intime hypothétiquement animé empruntant des voies différentes.
Quatrième de couverture
Fabrication du mouvement d'un verbe à l'infinitif, resté longtemps immobile. Le langage a trahi. Il circule, dans le courant des prises électriques, des vagues, chemine, à la recherche du petit portail vert, voudrait se perdre dans les couloirs. Il reste un temps pourtant, errant dans son couloir infinitif, pendant des années il erre, au seuil de son enfance sans parler, comme un papier en feu il garde son secret, dans sa version d'errance corporelle. Le verbe croise le poème, il prend forme et livre toute la douceur de sa cruauté admirable. Il vit, dans un corps qu'il savait absent, qui s'anime et se met à rire. Le petit portail vert, de retour, les feuilles les plages la mer l'amour, tout est revenu, long poème traversant les espaces les portes et les nuits. L'aimable verbe infinitif respire dans sa forêt de mots, mise en forme du vide, ne pas perdre de vue, retrouver son amour, les segments de son esprit dans la phrase perdue dans la soupe. En attendant, la tempête dans le jardin et les cheveux, on ne touche pas le passage.
Extraits choisis
01
Cet accès direct à l'enfance
Le petit portail vert au bout
Du chemin
Lumière du soir dans
Les yeux
Les herbes hautes en mouvement
D'elle émanait tout un feuillage
Dense vert lumineux
Sonore
Fil à linge drap flottant
J'ai perdu l'horizon vif
Et léger de ta voix
Suspendu dans l'air flottant
Le verbe attend le moment
De venir
Dire
Ce que seule la poésie
Peut dire
Dans un espace I- passer dans un espace II-
Retrouver la plage
Et le petit portail vert
Une forêt de mots
Un jardin fleuri dans le verbe
Ne pas perdre de vue les mots
Leur chaleur
Segments qui délimitent l'espace de mon esprit
Te retrouver dans une phrase, une construction
L'espace de la page, la mise en forme du vide
02
O-R
Récit interrompu recomposé
Structure limpide de la mémoire
L'énigme de la plage la nuit
Sur la vague le verbe nu
Nage sans interruption
Ni entrave
le corps léger du verbe à l'infinitif
03
V-E-R-S
Honteuse version
La chair débordait la peau
Les mots avaient trahi longtemps
Aucun mort
Un carnaval à la fenêtre plus tard
Nous regardions le début le bois le sel
Dans la brèche du verbe
La vraie version empruntait le petit chemin
qui menait à la plage
Petit portail vert
Personne ne savait
04
I-O-N
Déclenchement de la phase sonore
En mouvement
Le doigt dessus
Le déclencheur dessus le verbe
Les trottoirs qui défilent
Alignement de la chute
L'œil en bas des jambes
Pression en suspension dans l'air
Les lèvres prêtes à prononcer
Le verbe à l'infinitif
N'est plus disponible
05
Couloir infinitif 2
C'était juste pour regarder
par la fenêtre
Chercher des morceaux de cartons au loin
Pour en faire des couloirs
De longs couloirs à photographier
Elle n'était pas déchirée par cette pensée
Elle savait qu'elle avait marché longtemps
Les yeux ouverts
Ses mains tremblaient
Pourtant tout le monde ne tremblait pas
Là n'était pas la ressemblance
La pluie tremblait
Faisait trembler l'espace infini
À la fenêtre
Un jour de pluie
Les couloirs se trouvaient au bord d'une falaise
À perte de vue la mer sombre du mois de décembre
Dans les rouleaux se dessinaient les lignes
Les reflets dans le cœur, et au loin les couloirs
Menaient à terme dans l'humide chemin
Elle savait qu'elle écrivait sur le bord de la falaise
Les yeux ouverts et les mains tremblantes
Et soudain la mer soulevait les airs
C'était un jour de pluie
06
Espace de la version audible, poèmes 7 à 10
7. Ciel d'orage
Légèrement à côté de soi-même
Un temps sur la mer
Déplacement du cœur vers l'ouest
Dix degrés de glissement
Marcher dans tes pas d'enfant
Les yeux regardaient ailleurs
Le ciel d'orage menaçant l'équilibre
Le cœur vers l'ouest tremblait
À petits pas se glissait
Sur la surface de l'eau
Un temps sur la mer
Déplacement des mains vers le nord
La peau soudain frissonnante
À dix degrés marcher tout droit
Les pas dans le vide
Et sur la surface de l'eau frissonnante
Un dessin de toi
07
O-R
Dans l'univers désentravé
Tu rêvais d'évoquer l'attente
Nous écoutions les chants d'oiseaux dans le jardin
Du petit portail vert
Qui menait à la mer
Le soleil sur tes bras nus
Rien ne s'imposait
J'absorbais, tu riais
Dans une extrême résonance
Dans les lieux les plus communs
Les éléments se détachaient
Les uns sur la peau
Les autres dans une limpide immédiateté
La dynamique du réel
Vu par toi et moi
08
V-E-R-S
Ton imprévisible gaîté
Dit la réalité de tes contours
Un ou deux détails de toi
Loin du carnaval ton éclat
Je cherche des points de vision
Un nouvel angle de toi
Je suis la libellule
Dans ton infime entrevue
Ta géographie première
Originelle et sans trace de pas
Passe ma petite luciole
Dans ma tête encombrée tu chemines
Tu te déplaces dans mes vestiges
Tu les déplaces
Déclinaisons à la syntaxe souple
J'aime tes déplacements incertains
09
O-R
Les pieds reposés sur un sac
Je regardais les prises électriques
Leurs positions étranges
Au ras du sol
J'interrogeais leur point de vue
D'en bas
Je m'allongeais, sereine et
Le masque traitant le cuir chevelu
Hydratation à base de nutriments
Qui visitait les combles
Évoque avec nostalgie
Le petit portail vert de l'enfance
10
10. Chronologie
Réflexion sur un nuage
Chapitre poème cinq
Des voix sans chronologie
Ni rupture
Réflexion sur un nuage
Chapitre poème cinq
Des voix sans rupture
Ni chronologie
Réflexion sur une chronologie
Sans chapitre cinq ni poème
Nuage avec voix
11
Espace incertain entre I et II
Évocation de l'état d'un personnage féminin
La soupe n'était pas bonne
Un étang de rumeurs
Insaisissable soupe glauque
Menaçait d'assécher les contours
Et faisait resurgir les peurs
Les peurs de la soupe
Envahissaient le restaurant
Et les rues un peu plus tard
Et les esprits
Un peu plus tôt le personnage
Avait tout imaginé
Le soir le restaurant les rires
La langue était faite pour raconter
Une vie quotidienne
La faille du langage
Dans les failles du quotidien
La soupe n'était pas bonne
Et soudain le langage a sombré
Dans le fond d'une assiette
12
Espace du cadre et de l'assiette
La soupe avait assombri l'horizon
Rassurant et audible
La version volait en éclat
Fracassant la surface du liquide
Les vagues surgissaient de l'assiette
Inondaient le restaurant les rues
La ville entière
La structure et l'ensemble
Le verbe hésitait
Le verbe allait vriller
Il contournait avidement
Le sens habituel
Et les visages restaient muets
Incapables de signifier
Sans structure ni ensemble
Perdue la question de l'ensemble
Le début de la fin
Dissociés dans un ensemble du passé
Les visages
L'éclatement du verbe
Parti du dictionnaire
Rebelle
Impossible d'atteindre la phrase
Trop tard
En exil
13
Un siècle de marche
Le début la fin déstructurés
Des morceaux de verbes
Fragmentés
Aucun mort
Des îlots de mort seulement
Des îlots dans la tête
Des plages entières de sable
Des îles sur la soupe
Soufflées
L'arrêt brutal
Un soir de carnaval
À la fenêtre, sans prévenir
Quelques personnages
Une soupe
Des assiettes et des îles
Un restaurant
Un petit portail vert
allait bientôt venir
Du fond d'un avenir segmenté
Recoller les morceaux
Des assiettes brisées
Par la force des courants
Le fil conducteur a fondu
Il a fallu porter les mots dans la main
Tenter de poser un baiser tendre
Sur tes lèvres rêvées
14
Le bois vieilli par le sel
Tout était là
Dans la brèche des mots
Les yeux dans le vide des années
Des années durant lesquelles
Le vide des mots
Était rassurant
Ce soir les yeux ne pouvaient plus
Se raccrocher au siècle
Tombés dans l'assiette brisée
De la terre à la cime du verbe
Le mot nouveau devait remonter
Lentement
Se construire un chemin
Une voix un visage des lèvres
Le mot remontait lentement
Dans le passage secret de la syntaxe
Forêt dense et épaisse
De la langue
15
Les longues allées du jardin
Les soirs d'été
L'enfance descendait à la plage
Les pieds dans l'eau calme
Les yeux brillants
Pendant des années pour longtemps
Lorsque soudain le verbe avait vrillé
Réflexion sur un poème
Chapitre cinq sans structure
Des voix sans chronologie
Il fallait avaler la soupe
Sans dire un mot
À s'en rendre malade
L'avaler sans s'engloutir
Mais la soupe reprenait le dessus
Submergeait la bouche
Les yeux pleins de larmes
Le verbe ce soir-là
a perdu son sens
Le nom est devenu
Imprononçable
À perdre pied sur le chemin
Le petit portail vert
Enseveli
16
La syntaxe une énigme
L'ordre des mots pour comprendre
Le bon temps à accorder
Finie l'histoire
Des soirs d'été et des couleurs
Iodées et fortes et enivrantes
Honteuse version
Fait déborder la chair
17
Un mur de mots
Impuissants
Le langage avait abandonné
18
Espace d'enracinement-inversion
Energie qui monte
Par la plante des pieds et
Soulève le cœur légèrement
Une respiration
Les yeux s'ouvrent
Totalement pupille au loin
Le sable le clapotis le sel
Tout monte jusqu'aux cheveux
Emmêlés dans leurs boucles
Des bains et réceptifs
Aux ondes du sol flottant
Nous n'aurons pas de lumière
Pour rentrer
Ma petite luciole tu
Me guideras
Et les étoiles que tu verras
En même temps que l'hémisphère
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