Présentation
Recueil sur la brèche, entre deux ou quelques grains, réflexion poétique sur le passage du temps, sur son existence et sur la nôtre, sur nos souvenirs d'enfance, de ce qu'il en reste et de l'espace dans lequel ils bougent, se tordent, se heurtent et finissent par se rencontrer. Un temps dont nous ne saisissons pas l'existence, qui agite les expériences d'enfant, les recherches de grains d'espaces perdus, d'instants vifs et successifs, posés en courbe dans la mémoire, issus d'une infinité de probables et de hasards. Même un conditionnel ne saurait être le temps juste lorsque les lignes disjointes finissent par se rejoindre, éventuellement, de découverte en découverte, de saut de ligne en mise en page, de verbe en souffrance face au vertige. Dans un dialogue avec les probabilités qui s'amusent, les poèmes se réécrivent, se prennent au jeu, de variations en variations, répondent à l'incertitude du temps. Le lecteur emprunte de petits chemins possibles, et puis d'autres, qui auraient pu être, un passage de temps existant, si jamais quelques grains dans leur chaos s'étaient aimés.
Quatrième de couverture
Temps 1 probabilité 1 épais en désordre, du bout de la langue le mot obscur caresse la perle métaphorique de l'espace, théorie exotique mêlée dans ta chevelure, des grains d'espace, perdus dans le temps, et le verbe essaie de le dire, mais il peine à dire ce grain fou, même un conditionnel aurait du mal à rendre compte de l'infime probabilité de rencontrer la courbe disjointe.
Temps 3 probabilité 1 Essai numéro 15 toujours rien la probabilité du grain d'espace me poursuit. Que veux-tu petite probabilité ? Pas d'ennui.
Temps 4 probabilité 1 Dans le désordre, l'esthétique de trop me fait peur, tout lissé.
Intériorité qui parcourt l'ébréché pour s'en servir de ponts, de réécritures de poèmes, de passages de temps incertains qui auraient pu ne pas être, ou être autrement, ou être une rencontre à peine probable.
Extraits choisis
01
Au début il y avait le temps
Le temps épais en désordre
Absolu maintien
De la moelle épinière
Au creux de tes mains
Dans ton espace boite
Géométrique aveuglé
Nous touchions le mystère
Du bout de la langue
Le mot obscur caressait
La perle métaphorique et douce
De ton espace-peau infini
02
Théorie exotique et fascinante
Le spectacle était prêt
Fusion du métal et du neurone
Les échanges électriques
Neutralisaient
Un pied pris entre les lattes
Du café crémeux
Un nuage de probabilité
De te croiser
Au hasard au détour
À rebours du tapis à poils longs
Mêlé dans ta chevelure
Et dans ton cœur en mouvement
Dynamique des jambes tous les jours
Même heure pour te croiser
Reproduction du même geste
À l’infini jusqu'au peu
De chance de la particule animée
Pas de certitude
Des grains d'espace
Perdus dans le temps
Et le verbe essaie
De le dire
Mais il peine à dire
Ce grain fou
Qui chemine dans la pointe
De tes jolies fesses
03
Et pourtant perdus
Perdus et heureux d’être perdus
Les petits grains s'amusent
Tirent des petits bateaux
Ficelle tendue dans la main
Flotte la coque et tourne
À l'envers dans le sillon
De l'eau à perte de vue
Petit bateau coque bleue
On s'amuse
Et c'est le bonheur heur
Sur le temps tendu
D'un fil déformé
Distendu sur l'onde
Du scénario le plus sûr
Le moins sûr
Le plus sûr le moins sûr
Le fil de l'onde se met à chanter
Un air d'enfance le dimanche
Sillons en boucle
En quarante-cinq tours autour
De la Terre du vide
Pas de son
L'enregistrement du vide
Me fait peur
Essai numéro 15
Toujours rien
Essai numéro visible soudain
La musique apparait dans l'espace
Se dessine dans l'air la note
Sur la cassette années quatre-vingts rien
Pas un son variable
La probabilité du grain d'espace
Me poursuit
Que veux-tu petite probabilité ?
Pas d'ennui
04
Raffinement progressif des arbres
Un matin au soleil
Pieds nus et tête en l'air j'allais
Toucher tes grains de sable
Savourer la douceur de l'infini
Le temps n'est plus
Une continuité
Qui s'écoule
Mais un grain dans la tête
De neurones en neurones
Agite la semoule
De la boucle
De la boucle sauvage
Sauvage désir de rire
Dans un champ gravitationnel
De lignes distinctes et amoureuses
Un désir en grains
D'aimer
Dans le désordre
L'esthétique le trop
Esthétique
Me fait peur tout lissé
Les belles phrases les belles coiffures
Les belles étoffes les belles montures
Oh les belles et belles et belles et belles
Un jeu d'enfant perdu
05
Salir les vêtements s'écorcher les genoux
De la boue plein les ongles
Petit bateau ficelle dans mon cœur
Je tire doucement
Pour t'appeler
Viens me voir adulte
Et parle-moi chaque jour
Montre-moi les rayons obliques du soir
La mer sur l'horizon courbé
Les cheveux universels accumulés
Au dos de la paroi supérieur du temps
Renversé et à l'envers
Le plafond du salon
Les casseroles au mur
Que je faisais danser
Traces de doigts dessus
Le cuivre étincelant de la cuisine
Le temps à lui seul n'y peut rien
Encore faudrait-il
Qu'il se manifeste
Petit grain temporel ?
06
Dans mon bateau ficelle je t'attends
Un grain de sable sur la joue
Et je le dépose sur toi
Tomber dans un temps amoureux
Dans le sillon quarante-cinq tours du dimanche
Tourbillonner au hasard
Et t'apercevoir
Si petite probabilité de mon cœur
Mon atome m'entends-tu ?
Je t'enregistrais sur une cassette
Dans le vide du
Au bord de
Je cherchais la dernière
Sur le rebours
De la boucle affolée
Je l'aimais fort et j'étais
Enfant
Avec toi je revois
Le rebord lumineux des dimanches
Tu partages une portion de plus
Du monde mystérieux
Etrange voyage sonore de la note
De ta voix qui vibre
Dans mon dos posé
Sur un mur en mouvement
Il pousse il pousse la masse
Brèche physique ébréchée
07
À la recherche de solitudes dans la ville
Appareil de mots en bandoulière
Le clic obturateur éblouit
La cruauté de l'atome resté seul
Et soudain un creux de ton sourire
Fait bouger un élément
Et puis deux
Et puis six
Et six vont ensemble réveiller les autres
Il est temps de mettre un peu
De désordre
Sur ce plateau trop bien arrangé
J'ébouriffe les meubles
De la ville debout
Dans les châteaux les gens
Ne sont pas seuls et préfèrent
Des rails bien dosés et des avions
Ligne de hauteur d'un temps
Lignes distinctes
Monde haute probabilité
Que vois-tu de nous dans la ville ?
Le temps n'existe pas
Il n'existe que par amour
Il devient plein
Il est probable que tu sois ma courbe
Que tu veuilles bien tirer la ficelle
De mon petit bateau et pêcher
De petits crabes dans les ruisseaux
Laissés par la mer basse qui revient toujours
Et recouvre de grands circuits dessinés
Des villes incroyables
Dont l'existence se trouve
Sur la brèche physique
Du sable blond couvert de soleil
Aime-moi dans l'eau
La lumière nous tombe dessus
Intériorité de la lumière
Qui parcourt l'ébréché
Pour s'en servir de ponts.